Face à la guerre sociale, construire la grève générale
1. Constat
Cet outil s’adresse aux prolétaires qui en bavent tous les jours dans cette société qui nous abrutit à force de nous exploiter et de nous épuiser.
Ce document synthétique s’appuie sur des expériences de grève et de lutte vécues dans le cadre du dernier mouvement social contre la réforme des retraites.
Il ne s’agit pas d’un mode d’emploi mais de repères issus de la lutte collective pour reprendre l’initiative :
Le prolétariat et la bourgeoisie sont des classes sociales antagonistes.
Les syndicats sont les grands absents de ce combat de classe parce qu’ils sont intégrés au système capitaliste et ne cherchent qu’à individualiser les problématiques.
Il faut lutter collectivement de manière autonome et radicale si l’on veut défendre ses intérêts.
La grève est un outil parmi d’autres dans le combat de classe, ce n’est pas le seul et il n’est pas suffisant pour changer la société.
Il va falloir trouver en nous les ressources pour nous débarrasser des capitalistes et de leur rapport social et maintenant plus que jamais dans cette période infernale de restructuration du capitalisme où l’ordre doit régner pour que l’exploitation perdure.
Il est toujours possible de se révolter même sur son lieu de travail ou d’exploitation.
2. Se mettre en grève, c'est se prendre en charge
Se mettre en grève implique un choix, celui de sacrifier son salaire pour défendre ou acquérir de nouveaux droits car si je ne me bats pas cet argent me sera arraché des mains tôt ou tard.
Se mettre en grève implique une perte de salaire proportionnelle au temps non travaillé.
Le temps de la grève doit être consacré à convaincre les collègues à se mettre en grève également.
Les discussions sur les conditions de travail sont décisives pour briser l’isolement, le cloisonnement : les conséquences sur la vie quotidienne, la fatigue physique et mentale, la politique du chiffre, les exigences de rentabilité et de performances, le manque de moyens pour travailler, le manque de fric pour vivre.
3. Comment faire grève, salarié du privé
Je travaille dans le secteur privé :
Tout salarié d'une entreprise privée peut se mettre grève, à condition qu'il soit accompagné par d'autres salariés de l'entreprise.
Si la grève suppose l’existence de revendications professionnelles, aucune condition n’est fixée quant à la manière dont elles ont à être communiquées à l’employeur. Ainsi, à l’exception des secteurs soumis à préavis, l’absence de toute formalité préalable obligatoire conduit donc à la validité des grèves surprises.
- Pas d’obligation de préavis de grève au plan national ou au niveau de la branche professionnelle.
- Pas d’obligation d’un avis de grève déposé par un syndicat.
4. Comment faire grève, salarié du public
Je travaille dans le secteur public :
L'exercice du droit de grève est soumis à préavis et fait l'objet de certaines limitations.
Pour se mettre en grève :
- Soit un préavis de grève a été déposé au plan national et/ou dans mon secteur d’activité.
- Soit je m’organise avec d’autres salariés pour contraindre les sections syndicales présentes sur mon lieu de travail à déposer un préavis de grève.
Ou
- Prendre en exemple la grève du centre de maintenance SNCF de Châtillon en octobre 2019 : des cheminots, syndiqués ou pas, ont décidé de débrayer sans préavis pour contester les méthodes de la direction du site.
5. Constitution d'une caisse de grève et de solidarité commune
La Caisse de Grève qu’est-ce que c’est ?
- C’est un dispositif de solidarité mis en œuvre par les grévistes.
- La caisse de grève soutient financièrement les grévistes.
- Ce soutien dépend bien évidemment des dons récoltés.
- Le principe d’une caisse de grève est une aide et ne pourra pas se substituer au salaire effectivement perdu.
- Des règles claires de redistribution à l'ensemble des travailleurs qu'ils soient syndiqués ou non syndiqués doivent être établies.
- Alimentation de la caisse de grève : récolte de fonds, marchés, soirées de soutien, taper dans les caisses des syndicats...
6. L'assemblée générale décisionnelle
L’Assemblée Générale constitue le poumon de la lutte. C’est là que les travailleurs peuvent véritablement s’approprier leurs luttes, décider collectivement. C’est le véritable lieu de la démocratie directe.
Il est donc important que l’assemblée soit :
- Indépendante des appareils politiques et syndicaux afin de pouvoir se consacrer à la défense de ses intérêts propres.
- Sur la base d’un ordre du jour, la discussion est nécessaire entre les membres de l’assemblée qui demandent la parole.
- La parole y est libre afin de faire tomber les tabous et que tous les sujets liés à la lutte soient évoqués sans freins. Les désaccords et les polémiques y ont leur place car il s’agit de dépasser les divergences.
- Faire le constat sur les forces en présence, ce qui peut favoriser ou au contraire freiner la lutte. Il s’agit de construire la lutte, et par conséquent, trouver la stratégie la plus efficace.
L’Assemblée Générale :
- Élabore ses positions, propose des actions votées à main levée.
- Vote une plateforme de revendications, base sur laquelle le combat peut être mené et les actions définies dans le but de vaincre (grève, occupation...).
- Vote la mise en place d’un organe exécutif chargé de faire vivre les positions de l’assemblée : le comité/collectif de grève, de lutte est constitué de membres de l’Assemblée Générale élus par cette même assemblée et révocables.
- Doit essayer de se coordonner avec des salariés organisés d’autres secteurs ou créer les conditions d’une coordination permettant de dépasser les corporatismes et les freins syndicaux.
7. Exemple de Plateforme de revendications
L’Assemblée Générale du ..., constituée de ... salariés, a voté à la majorité:
- La reconduction de la grève jusqu’au retrait
- Le retrait ....
- L’arrêt des suppressions de postes
- Le refus de l’application de ... (mesures auxquelles des grévistes pourraient être amenés à s'opposer)
- Le remplacement des départs en retraite
- La nécessité de se rapprocher des grévistes des autres secteurs en lutte, notamment dans le cadre d’une Assemblée Générale Interprofessionnelle
- Nous exigeons des augmentations de salaire ......
8. Les organes de coordination
Il est nécessaire de construire une structure regroupant les forces pour aller toucher les travailleurs dans les lieux de travail sur tout le territoire.
Une structure qui doit permettre aux travailleurs de tous les secteurs de trouver une aide pour se mobiliser collectivement dans leur boîte et exprimer leurs besoins.
Un organe de coordination indépendant des appareils politiques et syndicaux peut être cette structure.
Quelles actions mener pour coordonner l’ensemble des secteurs en grève ?
- Faire un appel général à l'ensemble des salariés, chômeurs, retraités, étudiants présents sur le territoire à rejoindre les actions de la coordination.
- La coordination propose un appui pour des interventions lors des Assemblées Générales, des diffusions de tracts, des actions...
- La coordination propose aux salariés d'élire des comités grève ou de lutte constitués de syndiqués et de non syndiqués — tous statuts et catégories confondus — afin de porter le mouvement, de l’élargir et de l’intensifier.
- En cas de difficulté pour organiser les Assemblées Générales du personnel sur les lieux de travail, la coordination exigera des sections syndicales, parce qu'elles en ont le pouvoir, qu’elles mettent en place des Assemblées Générales régulières.
- Proposer la constitution d'une caisse de grève et de solidarité commune.
- Proposer un départ en cortège commun pour les manifestations.
9. Enrayer la machine pour résister et lutter autrement
- Personne ne connaît mieux que nous-même ce qui freine ou gêne la production d’une tâche, d’une mission. Il faudra alors réfléchir à élaborer des stratégies pour retarder l’accomplissement de celles-ci.
- Sans s’en rendre compte nous nous adaptons à tous types de cadences lorsqu’il faut remplacer un collègue en arrêt maladie, en formation, en attendant le remplacement d’un départ à la retraite ou d’une personne en mobilité.
- Il faut pouvoir inverser la tendance pour pouvoir ralentir voir freiner notre productivité, cela doit être vu comme une autre manière de lutter et de rentrer en résistance, c’est une alternative à la grève. On est au travail mais on fait tout pour être le moins productif possible.
- Cette stratégie était utilisée par les ouvriers au XIXème siècle contre l’introduction des machines nouvelles pour remplacer les techniciens, afin d'obtenir des meilleures conditions de travail et de salaire.
- Emile Pouget disait : « Il faudrait des camarades parmi les professionnels qui, connaissant le mieux les rouages du service, sauraient trouver les endroits sensibles, les points faibles, frapperaient à coup sûr sans faire de destruction imbécile et, par leur action efficace, adroite et intelligente autant qu’énergique, rendraient, d’un seul coup, inutilisable pour quelques jours le matériel indispensable... »
Lien youtube : youtu.be/IDqYA9b65i8
