Faire le deuil du vieux monde

Communiqué n°87 - Janvier 2022

Nous entendons parler de « monde d’avant » et de « monde d’après ». Nous serions dans une période transitoire entre deux mondes, et il faudrait faire le deuil du bon vieux temps, sous prétexte d’une dangereuse pandémie.

La psychiatre Elisabeth Kübler-Ross1 décrit le deuil comme un processus en cinq étapes : déni, colère, marchandage, dépression et acceptation. Ces étapes ne sont pas nécessairement dans l'ordre indiqué ci-dessus, toutes les étapes ne sont pas non plus vécues par tous les patients, mais chacun en vivra toujours au moins deux, avec des durées différentes.

Nous pouvons construire par analogie à ce processus, une analyse de la situation que nous vivons depuis maintenant deux années :

1. Le choc

Première phase dans laquelle une situation inédite engendre le déni ou la colère au sein de la population, puis rapidement la sidération prend largement le dessus. Les médias aux ordres des gouvernements propagent la peur, l’état d’exception est affirmé comme la solution pour sauver les corps d’une menace contagieuse2.

2. Le chantage

L’impossibilité d’un retour à une situation antérieure est acquise dans la majorité de la population. Le marchandage émotionnel introduit le chantage aux libertés individuelles et collectives. La bourgeoisie manipule les chiffres pour arriver à ses fins, elle exploite le nouveau filon faisant fi de la logique et des contradictions3. Il s’agit d’amener les conditions adéquates pour un nouveau cycle de reproduction et d’accumulation du capital avec un nouveau standard de valeur.

3. La dévalorisation

Une période plus ou moins longue de dépressions s’ouvre. Les services de santé sont vite débordés car ils ne sont pas en nombre suffisant, du fait des choix politiques passés de restrictions budgétaires4. La société du spectacle, ou du présent perpétuel, est un pandémonium géré par des conseils de défense. La bourgeoisie est en guerre, contre nous, son objectif est de déshumaniser la population pour la déposséder de son existence et de ses outils critiques.

4. La restructuration

La majorité se résigne, s’adapte et obéit aux injonctions, volontairement ou sous la contrainte. Le divertissement et les loisirs sont des refuges individuels stimulant la dopamine -ou hormone du bonheur- pour des plaisirs immédiats5. La bourgeoisie poursuit son programme vers le totalitarisme marchand : soumission des corps et des esprits au contrôle social numérique. L’opposition et les contre-pouvoirs de la république bourgeoise sont caducs.


Ce schéma est généraliste, et montre les tendances de fond qui structurent la période actuelle. Mais il n’y a pas de fatalité, les luttes de classes viennent sans cesse modifier l’agenda bourgeois. Les luttes au sein de la bourgeoisie modifient aussi les orientations, mais l’objectif reste le même : ne pas perdre le pouvoir. Et tous les moyens sont bons pour maintenir le régime capitaliste : mensonge, corruption, manipulation, destruction, meurtre, guerre. Le capital est un système mortifère, ses dirigeants sont des gangsters6. Face à eux, les minorités révolutionnaires agissantes sont des îlots de résistance, d’espoir et de vie au sein de la machine.

Nos frères et sœurs de classes des Antilles7 nous montrent un exemple de pratique de luttes à reproduire :

  • organiser la grève générale illimitée avec des piquets, barrages, manifestations, caisses de soutien, occupation des entreprises et des espaces publics, assemblées générales indépendantes et décisionnelles8,
  • organiser l’auto-défense armée du prolétariat pour dissuader les forces de répression d’intervenir, et organiser la coordination de tous les groupes révolutionnaires engagés dans la lutte.

Cette formule permet dans un premier temps de faire reculer le gouvernement. Par la suite, le plus dur est de résister aux contre-attaques de la bourgeoisie et aux tentatives de division dans nos rangs. Une fois l’organisation de la lutte enracinée, s’ouvre le champ des possibles et le deuil de ce vieux monde décadent.

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