Nous venons de publier une note de lecture : Algues vertes, L’histoire interdite
Travail
Du latin trepalium, instrument de torture. Le travail est une activité de transformation de la nature, propre aux hommes, qui les met en relation et qui est productrice de valeur.
Dans la société capitaliste, la grande majorité des humains - ou prolétariat - est obligée d’effectuer un travail salarié pour survivre. Obligée de vendre sa force de travail à la bourgeoisie pour se nourrir, se loger et se soigner.
Sans travail il n’y a pas de capital. Le capitalisme vit sur l’exploitation effrénée du travail du prolétariat. Sur l’extorsion de la plus-value sur le travail salarié.
Se battre pour la réduction du temps de travail est révolutionnaire dans le sens ou l’on réduit la production au temps de travail nécessaire. Et à la condition toutefois que le temps récupéré s'inscrive dans une stratégie plus large visant à l'abolition du capitalisme. Dans le cas contraire, cette réduction de temps de travail ne sert que les intérêts des syndicats et partis réformistes complètements institutionnalisés qui peuvent alors affirmer, à l'instar de Lénine, que le prolétariat est incapable d'aller au delà d'une conscience réformiste, c'est à dire de faire plus que défendre ses propres intérêts au sein du système capitaliste. La réduction du temps de travail ne doit donc pas camoufler une augmentation de la productivité nuisible aux travailleurs, comme ce fut le cas avec la loi des 35 heures qui, en permettant une restructuration des moyens et méthodes de production dans de nombreux secteurs, a diminué le salaire réel, accru le chômage, la précarité et le taux de plus value.
Le capitalisme produit pour vendre en premier lieu et non pour satisfaire des besoins humains. Le travail s’en trouve déshumanisé à son maximum. Quelle satisfaction y a-t-il à produire pour produire ?
Le travail, pour beaucoup de nos semblables en Occident, est une corvée quotidienne nous permettant de survivre et de nourrir nos familles. Très peu exercent réellement une profession avec passion, et beaucoup font semblant de travailler avec intérêt. Le chômage de masse, apparu il y a 30 ans, a bouleversé le rapport au travail. Jadis, on s’adonnait ouvertement à la destruction des chaînes salariales, aujourd’hui on réclame du boulot quand on en est privé et on se satisfait quand on est épargné par l’inactivité et la précarité. Ce changement de mentalité est révélateur d’un bouleversement des rapports de classe. Hier, le patronat redoutait que l’ouvrier le jette, lui et son travail aliéné, à la poubelle de l’Histoire. Actuellement, les travailleurs viennent d’eux-mêmes picorer les miettes de leur renoncement dans les mains empoisonnées du bourgeois. Pourtant, on attend tous la paye à la fin du mois. On subit ou on participe à la hiérarchie, cette forme arrogante de domination du capital sur l’être humain, et on rentre chez soi toujours un peu plus détruit d’avoir encore passé une journée à renoncer à soi-même.
Le travail, pour beaucoup de prolétaires du Tiers-Monde, est un nouvel esclavage dans des conditions honteuses et dangereuses. Les gens sont des marchandises sur lesquelles on a écrit « telle force de travail à tel prix ». La concurrence entre les travailleurs est permanente.
Le capitalisme est un système plus vicieux que l’esclavagisme et le féodalisme, car les prolétaires sont obligés de se vendre au prix fixé par les lois bourgeoises pour pouvoir vivre décemment. Nous n’avons aucune emprise sur nos conditions d’existence. Nous sommes subordonnés à l’offre et la demande de travail des entreprises. La présente crise nous démontre une fois de plus, et brutalement, combien nos vies dépendent directement de cette sordide réalité.
Nous sommes aussi soumis à l’organisation du travail. Depuis la division du travail d’Adam Smith au management participatif, en passant par le paternalisme et le fordisme, tout est fait dans le système capitaliste pour exploiter au maximum les « ressources humaines » afin de dégager le plus possible de bénéfices et de rentabilité au détriment de la personne humaine et des besoins collectifs.
Face à cela, la classe ouvrière avait, dès le 19ème siècle, créé des syndicats de défense des salariés. Le syndicalisme était le mouvement prolétarien visant à l’abolition des classes sociales comme énoncé dans la Charte d’Amiens de 1906. La grève devient l’arme la plus efficace des prolétaires afin de stopper le processus de production et de réclamer des meilleures conditions de vie. Aujourd’hui, le syndicalisme n’est plus qu’un rouage de la gestion capitaliste du monde.
Depuis la création de l’Union Européenne, les objectifs des gouvernements réunis à Bruxelles sont de libéraliser et flexibiliser le « marché du travail » afin de nous rendre plus serviles et corvéables. On lit dans les livres scolaires que les droits des salariés (Code du travail, Convention Collective) sont des freins à l’économie et au plein emploi. Rien n’est plus faux de nous faire croire que le système capitaliste vise au plein emploi. Le chômage de masse sert à justifier le chantage au travail et la baisse générale des salaires.
Plus son système est incapable d’assurer le minimum vital à la population parce qu’il écrase les salaires et pille les richesses, plus le grand patronat nous martèle qu’il est impérieux de « réhabiliter le travail ». En réalité, il s’agit de rétablir l’idée fallacieuse que le travail serait déprécié en France et qu’il pourrait nous apporter la liberté. Pour les bourgeois et capitalistes, la liberté c’est « travailler plus pour gagner plus », autre idée mensongère pour allonger le temps de travail et l’exploitation du salarié. Cette mesure impopulaire est accompagnée d’une « exonération des charges sociales sur les heures supplémentaires », avec comme conséquence de piller notre Sécurité Sociale.
Souvent les médias nous vantent les mérites des pays scandinaves. Les bobos adorent citer ces exemples où la « flexsécurité » est la norme règlementaire du travail salarié. Le mélange entre flexibilité et une soi-disant sécurité donnerait des taux de chômage bas, mais la réalité est la précarisation des travailleurs au travers de la généralisation des pratiques intérimaires où la peur du lendemain est quotidienne.
La classe dominante ne cesse d’attaquer les quelques droits que les générations prolétariennes précédentes avaient réussi à lui arracher. Les derniers exemples les plus frappants sont la réforme des « régimes spéciaux » de retraite, la banalisation du travail le dimanche et les jours fériés et la liquidation du code du travail, d'abord sous l’effet de l’accord national MEDEF-CFDT-CGC-CFTC sur « la sécurisation de l’emploi » que le Parti Socialiste s’est empressé de traduire sur le terrain législatif, puis dernièrement avec le passage en force de la loi travail (à coup de 49-3) et les ordonnances Macron.