La déconstruction de la lutte est En Marche !
Les lois Travail I et II n'auront pas suffi à calmer l'appétit insatiable de l'hydre bourgeoise aux cent têtes voraces, il lui faut avaler toujours plus de droits, toujours plus de baisses des salaires, toujours plus de suppressions de postes et de places dans les facs et autres augmentations de droits d'inscriptions... Pour y parvenir elle peut compter sur son fidèle toutou de toujours : l'État avec à sa tête le président de la guerre aux pauvres En Marche !
Après avoir sévèrement réduit l'ISF pour soulager les pauvres millionnaires, il baisse les APL de 60 € (oser s'y opposer, c'est insulter la mémoire du nouvel héros épouvantail de la république : Arnaud Beltrame1), l'agent Macron-actif et sa clique de (s)inistres nous font la guerre simultanément sur tous les fronts : chômeurs, retraités, étudiants, fonctionnaires, cheminots. C'est la totalité d'une classe sociale qui est visée : ceux qui, pour vivre, manger et dormir sous un toit n'ont pas d'autre choix que de louer leurs bras, leur sueur et leur temps à un patron ; en un mot, il s'attaque à tous les prolétaires.
En face la lutte demeure éparpillée : les syndicats ne proposent que de maintenir strictement séparés les secteurs en lutte : ils (dés)organisent le mouvement des étudiants contre la loi Vidal et le Plan Étudiant, celui des cheminots contre la fin du statut et la privatisation de la SNCF, celui d'Air France pour une augmentation des salaires de 6 % et celui des salariés de Carrefour contre la suppression de 2400 emplois et la baisse drastique de la prime de participation...
Du côté des étudiants, lorsque ce ne sont pas les syndicats et autres partis politiques qui phagocytent leurs luttes, c'est le petit milieu pseudo-radical, pour qui la responsabilité de toutes ces attaques contre nos vies que nous subissons depuis des années n'incombe point à la classe sociale qui s'empiffre sur notre sueur et dirige l'appareil d'État et toute la sphère économique (qui n'est autre que la source de son pouvoir) mais aux « blancs esclavagistes » et aux « mâles hétérosexuels ».
En conséquence, leurs priorités politiques, qui devraient être (puisqu'ils s'affirment révolutionnaires) l'unification et la politisation qui en est consubstantielle des luttes des travailleurs et des étudiants (ce qui implique une lutte contre les appareils para-étatiques que sont les syndicats/partis), consistent plutôt à diviser le mouvement entre différentes catégories promues par leur idéologie postmoderne2 (pour ensuite appeler à leur convergence !) que seraient les « non-blancs » ou autres « minorités de genre et de sexualité », lesquelles ne peuvent bien entendu avoir le moindre intérêt en commun avec ceux qui ont le malheur d'appartenir aux catégories ennemies que seraient les « blancs » et les « mâles hétérosexuels ». Ainsi leur « convergence des luttes » passe notamment par les assemblées en « non-mixité de races » interdites aux « blancs » (mais ouvertes aux islamistes !). De plus, iels trouvent indispensable que tou.te.s utilisent cet.te écritur.e incompréhensible. En effet, il est pour eux autrement plus important d’écrire en inclusif et plus largement de « déconstruire »3 nos rapports inter-individuels que d’organiser une coordination (et non simplement une « convergence » des luttes sectaires) avec les autres secteurs en lutte que sont les cheminots, les postiers, les hospitaliers, les salariés d’Air France, de Carrefour et tous ceux susceptibles de se joindre à nous !
Pour mener à bien leur travail de sape, ils ont pour allié objectif la passivité politique au sein du mouvement, qui est bien visible dans les AG étudiantes où la parole des bureaucrates est d'or tout autant que le silence des étudiants. Il n'y est nullement question de remettre en cause l'État, le "service public", le capital mais bien au contraire de les défendre en tant qu'acquis sociaux ; ils oublient de préciser que la bourgeoisie n'a lâché ces « acquis sociaux » que pour calmer la fureur révolutionnaire des travailleurs et qu'ils étaient d'emblée entendus comme temporaires. L'idéologie identitaire (principalement dans sa variante postmoderne) vient ainsi combler ce vide politique causé par la bureaucratisation de la lutte: les étudiants se voient fournir un package idéologique tout prêt, celui-ci leur permet de se sentir radicaux sans avoir à réfléchir aux fondements de cette société. Bien entendu les bureaucrates ne s'y opposent point du tout, pourquoi le feraient-ils ? La compartimentation des luttes que promeut le postmodernisme est très compatible avec le corporatisme et celui-ci est pour eux aussi un substitut politique à l'unification des luttes avec les autres secteurs, là encore il permet aux étudiants de ne pas se poser de questions sur l'isolement qui s'impose à eux. En attendant, les flics peuvent tranquillement évacuer les facs : pas la moindre solidarité à l’horizon !
Dans un contexte qui laisse espérer un mouvement puissant prompt à faire très mal au gouvernement, syndicats et milieu pseudo-radical s'allient pour empêcher que cela ne se produise, Prenons-les pour ce qu'ils sont : des ennemis de la conscience révolutionnaire !
Abattons le capital et l'État, y compris le service public !
Notes :
[1] Lire la phrase d'Emmanuel Macron à ce sujet : http://www.leparisien.fr/politique/beltrame-et-les-50-euros-d-apl-la-phrase-de-macron-qui-choque-07-05-2018-7703106.php#xtor=RSS-1481423633
[2] Le postmodernisme est une idéologie née des divagations de « philosophes » tels que Michel Foucault, Jaques Derrida, Gilles Deleuze (la French Theory) et des postcolonial studies et gender studies nord-américains. Pour plus de détails, lire Le postmodernisme ne casse pas des briques sur la revue Négatif : https://laretive.info/wp-content/uploads/2017/08/necc81gatif-24.pdf
[3] Concept à la mode promu par l’idéologie postmoderne, la réalité est réduite à une série de « constructions sociales » qu’il suffirait de « déconstruire » pour les éliminer...