De quoi le confinement est-il le nom ?
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Pendant deux mois, nous étions enfermés chez nous – quand nous avons la chance d’avoir un toit -, nous devions nous rendre au travail s’il n’était pas possible de le faire à domicile, parfois sans protection. Comment se fait-il qu'à une période où l'humanité a développé tant de savoirs et de techniques pour produire ce qui nous est nécessaire, une épidémie puisse avoir tant de conséquences ? Si nous devons nous poser cette question, c'est parce qu'en apparence les conséquences sur nos vies sont inédites : la moitié des prolétaires du monde se sont retrouvés au chômage du jour au lendemain, souvent sans allocation pour remplacer le salaire perdu. Dans de nombreux pays, y compris dans les pays occidentaux, les travailleurs sans revenus ne peuvent plus se nourrir correctement. Les libertés publiques restantes, libertés de circulation et de réunion, ont été suspendues.
Mais la mise en quarantaine collective, présentée comme seule solution valable, est-elle uniquement, ou est-elle réellement, une mesure sanitaire pour contrer l'épidémie de Covid-19 ?
On prétend ainsi que la crise économique et ses effets désastreux (chômage, misère etc) sont la conséquence de la crise sanitaire et du confinement, comme si la catastrophe économique n'était pas depuis longtemps annoncée. Déjà, ces dernières années, les échanges internationaux ont ralenti, et la spéculation boursière qui atteignait des sommets montrait la difficulté pour les investisseurs de trouver des activités rentables dans l'économie. La crise boursière a éclaté avant la mise en confinement de la majorité des pays du monde. Les États maintiennent à présent l'économie mondiale à bout de bras. Le confinement peut alors aussi être perçu comme un verrou permettant à la fois de purger, restructurer l'économie et de nous empêcher de réagir à la dégradation vertigineuse de nos conditions de vie.
Comme pour la lutte contre le terrorisme, il est très probable que les mesures d'urgences sanitaires -mesures de répression et de régression inimaginables en temps normal- s'inscrivent dans la loi et mettent fin aux libertés publiques qu'il restait dans un certain nombre de pays dits démocratiques.
La classe dominante et le gouvernement sont-ils réellement "incompétents" ?
Manque de masques, service de santé dégradés et matériels de protection inexistants sont des sujets préoccuppants, coronavirus ou pas. Ces problèmes sont-ils le résultat de l'incompétence des gouvernants ? Ne sont-ils pas plutôt le résultat d'une organisation de la société où seul le profit compte ? Quand un gouvernement réduit les dépenses de santé publique, il attaque notre salaire indirect, il sait très bien quelles conséquences cela va avoir. Ces politiques sont pourtant appliquées depuis des décennies. Lorsque qu'on laisse, comme en France, des millions de personnes aller voter en sachant que, deux jours plus tard, le confinement sera appliqué, s'agit-il d'incompétence ou d'une volonté de faire durer la crise sanitaire ? Quoiqu'il en soit, faire semblant d'être incompétent est une stratégie efficace pour faire passer les mesures les plus inacceptables. Les gouvernements précédents nous l'avaient déjà démontré.
Si on vire les dirigeants, ça ira mieux ?
Les partis d'opposition et syndicats ne critiquent d'ailleurs souvent qu'une seule chose : cette incompétence des dirigeants. Cela leur permet d'éviter une critique réellement politique, pour la simple et bonne raison qu'ils ne cherchent qu'à exercer le pouvoir pour faire la même chose. Ils souhaitent que nous restions des exploités. Est-ce que cela changera quelque chose à notre sort ? Ne dépendrons-nous pas toujours du pouvoir des capitalistes, à qui l'État sert de puissant relais pour surmonter la crise ? Ce que tous ont fait semblant de découvrir, c'est que ce sont nous, les prolétaires, qui faisons tout fonctionner. Les applaudissements symboliques (au lieu d'un salaire décent) n'ont pas réussi à cacher cette criante vérité. Alors, ne devons-nous pas plutôt compter sur nos propres forces, à l'image de ces travailleurs qui se sont mis en grève – contre l'avis des syndicats – lorsque leurs patrons voulaient les faire travailler sans protection ? Ne devons-nous pas plutôt nous organiser dans chaque entreprise et dans chaque quartier, nous fédérer avec les travailleurs de toute la planète pour organiser la production nous-mêmes ? La question se pose aujourd'hui plus que jamais.
