Pour qui roulent les antisémites ? POUR QUI ?

Communiqué n°84 - Septembre 2021

Si vous ne voulez pas vous faire vacciner, je vais vous faire arrêter et je vous injecterai le vaccin dans le derrière.

Rodrigo Duterte, dictateur philippin, juin 2021

On vous vaccinera de force, moi je vous ferai emmener par deux policiers au centre de vaccination.

Emmanuel Lechypre, journaliste macroniste, juillet 2021

Duterte « a fait exécuter un tiers de sa population pour en finir avec la [drogue], ce qui fait de lui un grand homme »

Papacito, youtubeur néo-fasciste, adepte de la « manière forte », mai 2021

Deux extrême-droites s’affrontent aujourd’hui, l’une est au pouvoir, l’autre aspire à y être. Pendant que, sous prétexte de crise sanitaire, de confinement en couvre-feu, de conseil de guerre en conseil de guerre, entre lois d’exception, état d’urgence et « pass sanitaire », Macron et ses sbires enterrent peu à peu nos dernières libertés et nous préparent pour l’abattoir, une autre extrême-droite, se prenant brus­quement de passion pour la liberté, se dresse contre la dictature sanitaire. Alain Soral et Marine Le PenOubliant du jour au lendemain son amour immodéré pour les bourreaux sanguinaires, les hommes « à poigne », bien virils et surtout bien tortionnaires, tels Poutine, Bachar el-Assad ou Maduro, toute cette « dissidence » en peau de lapin se met soudain à brailler contre les intolérables restrictions que le pouvoir fait peser sur nos existences et sur nos vies ! L’extrême-droite se pose en cham­pionne des libertés : quelle rigolade !

C’est au nom de la liberté, c’est contre l’État que nous refusons le « pass sanitaire » et les mesures de contrôle ; c’est le Pouvoir et sa police qui se dressent contre nous. Il y a peu, c’est l’État, c’est sa police qui a éborgné, tabassé et mutilé les gilets jaunes : ces gens-là ne sont pas « avec nous », ils ne sont pas nos « amis », sauf si nous détestons la liberté et adorons la répression. L’État est dirigé par des riches, par des bourgeois, qui savent défendre leurs intérêts en s’appuyant sur leur police et sur leur armée. Jean-Marie Le Pen et Ronald ReaganIl n’y a pas et il n’y aura jamais d’armée ou de police du « peuple » si, par peuple, on entend la masse des prolétaires, de ceux qui n’ont pas de rentes et pas d’héritages mirobolants et qui sont obligés d’aller travailler pour vivre et pour faire vivre leurs proches. Chaque fois qu’ils se révolteront et refuseront leur sort, ils trouveront la police et l’armée pour tenter de les faire rentrer dans le rang. On ne paye pas la police et l’armée pour être nos amis mais pour nous écraser.

La presse et la quasi-totalité de la classe politique assimilent depuis le début les manifestations anti-pass à des manifestations d’extrême­-droite. Ceux qui refusent de critiquer la dictature à prétexte sanitaire n’ont évidemment aucun droit à critiquer les manifestants. Mais les opposants au « pass sanitaire » qui réclament une dictature militaire perdent eux aussi tout droit à critiquer le gouvernement. Et d’ailleurs, QUI désigne les Juifs comme responsables de tous les malheurs actuels ? QUI détourne la colère contre la dictature sanitaire vers des boucs-émissaires ? QUI fait semblant de confondre riches et juifs ? QUI se focalise sur les Rothschild et pas sur Jeff Bezos, Warren Buffet, Bernard Arnault et toute l’écrasante majorité de capitalistes non-juifs  ? QUI se cache derrière ces militaires signataires de tribunes et qui réclament un pouvoir fort, comme si le régime actuel n’était pas assez dictatorial ? QUI offre au gouvernement le meilleur moyen de nous discréditer en entretenant la haine et la confusion ?

Florian Philippot appelle au durcissement du confinement sur Twitter.

La réponse est simple. Il s’agit de la communauté que nous connaissons bien, la communauté de tous les ratés, de tous les aigris, de tous les aspirants-dictateurs, des barbouzes et des officiers en goguette, des massacreurs en puissance et des recalés du pouvoir, des nostalgiques du colonialisme et du nazisme, de tous ceux qui aspirent à devenir califes à la place du calife et qui n’ont rien trouvé de mieux que la haine raciste (tant contre les juifs que contre les immigrés, en particulier les supposés "musulmans") pour épargner une fois de plus la classe au pouvoir et massacrer les innocents.

L’antisémitisme est un poison mortel au service du pouvoir et de la bourgeoisie : on l’élimine ou on en crève !


En complément à ce communiqué, nous reproduisons ci-dessous un extrait de La conception matérialiste de la question juive (1942), d'Abraham Léon, militant trotskyste belge mort en déportation à Auschwitz.

★★★

La petite bourgeoisie n'est pas seulement une classe capitaliste, c'est-à-dire une classe dépositaire en miniature de toutes les tendances capitalistes ; elle est aussi anticapitaliste. Elle a la conscience forte, quoique vague, d'être ruinée et dépouillée par le grand capital. Mais son caractère hybride, sa situation interclasse ne lui permet pas de comprendre la véritable structure de la société ainsi que le caractère réel du grand capital. Elle est incapable de comprendre les véritables tendances de l'évolution sociale, car elle pressent que cette évolution ne peut que lui être fatale. Elle veut être anticapitaliste sans cesser d'être capitaliste. Elle veut détruire le caractère mauvais du capitalisme, c'est-à-dire les tendances qui la ruinent, tout en conservant le caractère bon du capitalisme qui lui permet de vivre et de s'enrichir. Mais comme il n'existe pas de capitalisme possédant les bonnes tendances sans en posséder les mauvaises, la petite bourgeoisie est obligée de l'inventer de toutes pièces. Ce n'est pas par hasard que la petite bourgeoisie a inventé l'hypercapitalisme; la mauvaise déviation du capitalisme, son esprit du mal. Ce n'est pas par hasard que ses théoriciens, depuis plus d'un siècle notamment Proudhon, s'évertuent à lutter contre le « mauvais capitalisme spéculatif » et défendent l' « utile capitalisme productif ». La tentative des théoriciens nazis de distinguer entre le « capital productif national » et le « capital parasitaire juif » est probablement le dernier essai dans ce genre. Le capitalisme juif peut représenter le mieux le mythe du mauvais capitalisme. Le concept de la richesse juive est, en effet, solidement ancré dans la conscience des masses populaires. Il s'agit seulement, par une propagande savamment orchestrée, de réveiller et d'actualiser l'image du Juif usurier contre lequel luttèrent longtemps paysans, petits-bourgeois et seigneurs. La petite bourgeoisie et une couche d'ouvriers restés sous son emprise se laissent facilement influencer par une telle propagande et donnent dans le panneau du capitalisme juif.

Historiquement, la réussite du racisme signifie que le capitalisme est parvenu à canaliser la conscience anticapitaliste des masses dans la direction d'une forme antérieure du capitalisme n'existant plus qu'à l'état de vestige ; ce vestige est cependant suffisamment considérable encore pour donner une certaine apparence de réalité au mythe.

On voit que le racisme est composé d'éléments assez hétéroclites. Il reflète la volonté expansionniste du grand capital. Il exprime la haine de la petite bourgeoisie contre les éléments « étrangers » sur le marché intérieur ainsi que ses tendances anticapitalistes.

C'est en tant qu'élément capitaliste que la petite bourgeoisie combat le concurrent juif, et en tant qu'élément anticapitaliste qu'elle lutte contre le capital juif. Le racisme détourne enfin la lutte anticapitaliste des masses vers une forme antérieure du capitalisme, n'existant plus qu'à l'état de vestige.

Mais si l'analyse scientifique permet de déceler ses parties composantes, l'idéologie raciste doit apparaître comme une doctrine absolument homogène. Le racisme sert précisément à fondre toutes les classes dans le creuset d'une communauté raciale opposée aux autres races. Le mythe raciste s'efforce d'apparaître comme un tout, n'ayant que de vagues rapports avec ses origines souvent très différentes. Il tend à fusionner d'une façon parfaite ses différents éléments.

Ainsi, par exemple, le racisme extérieur, déguisement idéologique de l'impérialisme, ne doit pas, en soi, revêtir forcément un caractère antisémite. Mais par nécessité de syncrétisme, c'est ce caractère qu'il revêt généralement. L'anticapitalisme des masses, canalisé d'abord dans la direction du judaïsme, est reporté ensuite contre l'ennemi extérieur qui lui est identifié. La « race germanique » se trouvera en devoir de combattre le Juif, son ennemi principal, sous tous ses déguisements : celui du bolchevisme et du libéralisme intérieurs, de la ploutocratie anglo-saxonne et du bolchevisme extérieur.

Hitler dit dans Mein Kampf qu'il est indispensable de présenter les différents ennemis sous un aspect commun, sinon il y a danger que les masses réfléchissent trop sur les différences existant entre ces ennemis. C'est pour cela que le racisme est un mythe et non une doctrine. Il exige la foi, mais craint comme feu le raisonnement. L'antisémitisme contribue le mieux à cimenter les différents éléments du racisme.

Tout aussi bien qu'il faut fondre les différentes classes dans une seule race, il faut aussi que cette race n'ait qu'un seul ennemi : le Juif international. Le mythe de la race est nécessairement accompagné de son négatif : l'antirace, le Juif. La communauté raciale est édifiée sur la haine des Juifs, haine dont le plus solide fondement racial gît dans l'histoire, à l'époque où le Juif était effectivement un corps étranger et hostile à toutes les classes. L'ironie de l'Histoire veut que l'idéologie antisémitique la plus radicale de l'Histoire triomphe précisément à l'époque où le judaïsme se trouve en voie d'assimilation économique et sociale. Mais, comme toutes les ironies de l'Histoire, cet apparent paradoxe est fort compréhensible. A l'époque où le Juif était inassimilable, à l'époque où il représentait vraiment le capital, il était indispensable à la société. Il ne pouvait être question de le détruire. Actuellement, la société capitaliste au bord de l'abîme, essaie de se sauver en ressuscitant le Juif et la haine des Juifs. Mais c'est précisément parce que les Juifs ne jouent pas le rôle qui leur est attribué que la persécution antisémite peut prendre une telle ampleur. Le capitalisme juif est un mythe, c'est pourquoi il est si facile de le vaincre. Mais en vainquant son négatif, le racisme détruit également les fondements de sa propre existence. A mesure que s'évanouit le fantôme du capitalisme juif, apparaît dans toute sa laideur, la réalité capitaliste. Les contradictions sociales, un instant dissimulées par les fumées de l'ivresse raciale, apparaissent dans toute leur acuité. A la longue, le mythe se montre impuissant devant la réalité.

Malgré son apparente homogénéité, l'évolution même du racisme laisse clairement apparaître les transformations économiques, sociales et politiques qu'il s'efforce de dissimuler. Au début, pour pouvoir se créer l'armature indispensable à la lutte pour son espace vital, à la guerre impérialiste, le grand capital doit abattre son ennemi intérieur, le prolétariat. C'est la petite bourgeoisie et les éléments déclassés du prolétariat qui fournissent les troupes de choc, capables de briser les organisations économiques et politiques du prolétariat. Le racisme, au début, apparaît donc comme une idéologie de la petite bourgeoisie. Son programme reflète les intérêts et les illusions de cette classe. Il promet la lutte contre l'hypercapitalisme, contre les trusts, la bourse, les grands magasins, etc. Mais aussitôt que le grand capital est parvenu à briser le prolétariat grâce à l'appui de la petite bourgeoisie, cette classe lui devient un fardeau insupportable. Le programme de préparation à la guerre implique précisément l'élimination sans pitié des petites entreprises, un prodigieux développement des trusts, une prolétarisation intensive. Cette même préparation militaire nécessite l'appui ou tout au moins une sorte de neutralité du prolétariat, facteur de production le plus important. Aussi le grand capital n'hésite-t-il pas un instant à violer le plus cyniquement ses promesses les plus solennelles et à étrangler le plus brutalement la petite bourgeoisie. Le racisme s'attache maintenant à flatter le prolétariat, à apparaître comme un mouvement radicalement « socialiste ». C'est ici que l'identification judaïsme-capitalisme joue le rôle le plus important. L'expropriation radicale des capitalistes juifs doit jouer le rôle de garantie, de caution, de la volonté de lutte anticapitaliste du racisme. Le caractère anonyme du capitalisme des monopoles contrairement au caractère généralement personnel (et souvent commercial spéculatif) des entreprises juives lui facilite cette opération de fraude spirituelle. L'homme du peuple aperçoit plus facilement le capitalisme « réel », le commerçant, le fabricant, le spéculateur que le « respectable directeur d'une société anonyme » qu'on fait passer pour un « facteur de production indispensable ». C'est ainsi que l'idéologie raciste arrive aux identifications suivantes : judaïsme = capitalisme ; racisme = socialisme ; économie dirigée pour la guerre = économie dirigée socialiste.

Il est indéniable que des couches considérables d'ouvriers, privées de leurs organisations, aveuglées par les succès politiques extérieurs de Hitler, se sont laissées tromper comme ce fut le cas auparavant pour la petite bourgeoisie, par la mythologie raciste. Momentanément, la bourgeoisie semble avoir atteint son but. La furieuse persécution antijuive s'étendant à toute l'Europe, sert à montrer la victoire « définitive » du racisme, la défaite irréductible du judaïsme international.

La « théorie » raciale dominante actuellement n'est rien d'autre qu'un essai d'asseoir « scientifiquement » le racisme. Elle est dénuée de toute valeur scientifique. Il suffit d'observer les pitoyables acrobaties auxquelles se livrent les théoriciens racistes pour démontrer la parenté des « germains » et des Nippons ou l'antagonisme irréductible entre « l'héroïque esprit germanique » et « l'esprit mercantile anglo-saxon », pour en être complètement convaincu. Les divagations d'un Montandon sur la « déprostitution » de l'« ethnie » juive par... l'obligation de porter des étoiles de David ne valent certainement pas mieux. La prostitution véritable de certains « savants » au racisme montre un spectacle rare de déchéance de la dignité humaine. Ce n'est là d'ailleurs que l'aboutissement de la déchéance complète de la science bourgeoise qui déjà, sous la démocratie, n'était rien moins qu'objective.

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